Simples entretiens sur la prière 

Par Mr Samuel Dickey Gordon

Lorsqu’un homme L’invoque, cela prouve qu’il a déjà tourné sa face vers Lui. Sa volonté a agi et agi doublement : en l’éloignant du mal et en le rapprochant de Dieu. C’est un simple pas, mais un pas capital.

Cette invocation est le point de contact avec Dieu, le point où Sa volonté et celle de l’homme s’unissent. Celui qui crie au secours est entouré de difficultés et soupire après la délivrance. Dieu, qui lui parle, a vu depuis longtemps ces difficultés et, de tout temps, Il a désiré les écarter. Maintenant l’accord est complet et Dieu, grâce à cette volonté qui s’unit à la Sienne, atteint facilement Son but.

B : Une vieille question

Cela nous amène à cette question si souvent posée: Dieu se laisse-t-il influencer par nos prières? Aucun problème n’a été plus souvent et plus sérieusement discuté. Des incrédules, doublés de savants, ont répondu nettement : « Non ». Des chrétiens, des gens instruits, mais possédant une forte foi, ont répondu avec une certitude égale : « Oui »

Fait singulier; ils ont raison les uns et les autres; non pas, il est vrai, qu’ils aient raison dans toutes leurs affirmations, ni dans toutes leurs croyances, ni même dans toutes leurs manières de penser, mais dans leurs conclusions dernières, exprimées par ces mots si brefs : « Non ! Oui ! »

La prière n’influence pas Dieu - La prière influence sûrement Dieu. Elle n’influence pas Son but, elle influence Ses actes. Chaque chose pour laquelle on Le prie, chaque chose juste, évidemment, a été déjà l’objet de Ses pensées, mais il ne fait rien sans notre consentement. Son plan a été entravé par notre manque de bonne volonté. Quand nous apprenons à connaître Ses intentions et que nous en faisons un objet de prières, nous Lui donnons par là même l’occasion d’agir.

Il en résulte un double effet, heureux pour l’homme, néfaste pour Satan. Notre simple consentement annule l’opposition du diable; il ouvre les voies à Dieu et enlève les obstacles. La route, dès lors, est libre pour l’exécution du plan prémédité.

La question des lois de la nature, introduite parfois à ce sujet, est affaire purement accessoire. Elles ne sont que les simples moyens d’action dont Dieu se sert en face des forces secondaires; elles ne rentrent pas dans le plan de Dieu qui n’a pour but qu’un résultat moral. Que le soleil reste quelques minutes de plus au-dessus de tel ou tel point de la terre, c’est un simple détail de fort peu d’importance pour le Créateur, Son pouvoir n’en est pas affecté, car tout est entre Ses mains; Son plan non plus n’en est pas modifié, car Il a pour but des résultats bien plus sérieux.

Le péché a plongé la terre dans une situation si critique, que de telles interventions sont parfois nécessaires, pour que le plan de Dieu puisse se réaliser.

Dans les situations critiques, toute règle de conduite, divine ou humaine, est changée. C’est alors qu’on peut juger de la valeur d’un homme.

Si un homme jette à terre le fardeau qu’il porte et se précipite au milieu de la rue; si, sans motif apparent, il saisit convulsivement quelque chose sur le sol, nous concluons immédiatement qu’il est fou. Mais s’il accomplit le même acte pour se précipiter au secours d’un petit enfant qui trottine presque sous les sabots des chevaux ou sous un tramway électrique, personne ne pensera à le critiquer; on admirera au contraire, son courage, sa décision, et on attendra avec anxiété le résultat de son intervention.

Les situations imprévues obligent à une initiative particulière; quand elles se produisent, elles mettent notre force à l’épreuve; elles justifient nos actes et elles expliquent d’une manière satisfaisante ce que rien d’autre ne pourrait expliquer.

Le péché a plongé le monde dans une situation critique. Mis en présence de ce fait terrible, serons-nous des hommes de prière, des hommes capables des plus grands efforts que l’on puisse demander à des créatures mortelles ? En face de ce fait inouï, commencerons-nous de comprendre l’intervention de Dieu dans l’histoire et dans nos vies ? Le plus grand événement qui eut lieu sur la terre, la croix, fut, lui aussi, un événement imprévu sortant des lois de l’histoire.

Le fait que la prière ne produit aucun changement dans la pensée et dans le but de Dieu révèle d’une manière touchante son amour merveilleux.

Supposons que je désire vivement quelque chose et que cette chose me soit absolument nécessaire. Je vais à Dieu et je la Lui demande. Supposons aussi qu’il hésite à m’exaucer, qu’il n’ait pas le désir de m’accorder l’objet de ma demande, qu’il hésite vraiment. J’insiste, je plaide, je persiste dans mes supplications, et Dieu, peu à peu, est frappé de mon sérieux; Il voit que j’ai besoin de cette chose et, dans sa bonté, Il m’accorde ce que je demande. N’est-il pas un Dieu d’amour d’écouter ainsi mon appel ? Assurément. N’avons-nous pas vu souvent de telles scènes se passer entre l’enfant et son père ? L’enfant pense en lui-même : « Comme mon père m’aime! Il m’a donné ce que je lui ai demandé »

Mais supposons que Dieu pense sans cesse à moi. Dans son coeur, Il forme des plans d’amour pour moi, Il a le vif désir de me donner une grande part de ce qu’il possède. Cependant, dans Sa sagesse, Il ne me la donne pas, parce que je ne connais pas mes propres besoins. S’il me donnait ce qu’il a décidé de m’accorder avant que j’en aie compris la valeur et senti le besoin, je pourrais en abuser. Mais, dès que j’apprends à connaître mes besoins et la valeur des grâces divines, Dieu se réjouit de cet heureux changement en moi et Il s’empresse de répondre à mes prières.

Dites-moi, un tel Dieu n’est-il pas plus digne d’adoration que le premier ? Jésus a dit : « Votre Père connaît vos besoins avant que vous les formuliez »

Dieu est un Père. Il a pour le monde un amour paternel, on pourrait même dire un amour maternel. Il sait tout ce dont nous avons besoin, et il a décidé d’avance de nous le donner. Pour moi, la grande question, quand je demande un exaucement personnel, est celle-ci : Est-ce que je connais ce qu’il sait me manquer ? Est-ce que je pense à ce qu’il estime m’être nécessaire ? Souvenez-vous aussi que Dieu est plus consacré à Son plan d’amour que le plus sage, le plus aimant des pères que nous connaissions. Une mère pense aux besoins de son enfant, à la nourriture, aux petits plaisirs, au luxe même. Ainsi fait Dieu à notre égard, mais Il est plus aimant et plus sage que le meilleur d’entre nous.

J’ai souvent pensé que si Dieu venait à me dire : « Je désire te donner quelque chose comme preuve spéciale de Mon amour, parce que je t’aime, que désires-tu avoir ? » je lui répondrais : « Mon Dieu, choisis. Je choisis ce que tu choisiras »

Il pense à moi; Il sait à quoi je pense; Il connaît mes plus grands désirs et Son amour est si grand, qu’il choisirait quelque chose de plus beau que ce que j’aurais souhaité. Tel est notre Dieu. La prière ne change pas, ne peut pas changer un Dieu si bon. Pour toute chose juste et bonne nous pouvons recourir à Lui, car Il a déjà décidé de nous l’accorder; mais la prière ne modifie pas la volonté de Dieu; Il ne peut donner contre notre volonté, et notre consentement, exprimé par notre demande, Lui fournit seulement l’occasion de faire ce qu’il avait déjà décidé.

 
C : La plus belle prière

Il y a une prière par excellence, la plus belle que l’on puisse adresser à Dieu; c’est la base de toute vraie prière, l’aliment de toute supplication inspirée par l’Esprit. Jésus lui-même nous la donne; c’est la seule qu’il nous laissa. Elle est courte, mais puissante; quatre mots : « Ta volonté soit faite ! »

Recueillons-nous et approfondissons le sens de cette parole; que sa force, son essence, entre dans nos coeurs et les remplisse.
« Ta » volonté; celle de Dieu.

Premièrement, Dieu est sage; il possède toute la force intellectuelle, toute la pénétration, toute la sûreté de jugement que nous puissions concevoir.

Deuxièmement, il est fort, avec tout ce que ce mot implique de puissance et de pouvoir irrésistible.

Troisièmement, Il est bon, pur, saint, et nous pouvons donner à ces mots toute la force que nous leur attribuons quand nous les appliquons à ceux que nous connaissons intimement. Enfin, il est aimant, ou plutôt, car l’adjectif est insuffisant, Il est amour, il personnifie l’amour. Et sachez que nous ne connaissons pas le sens de ces mots; la meilleure définition que nous en donnions, la meilleure représentation que nous nous en fassions, même dans nos rêves, n’en donne qu’une pâle idée. Nous ne comprenons pas le sens intime de ces mots, car ils signifient infiniment plus que nous ne pouvons le supposer. Leur sens dépasse de mille coudées notre entendement.

Et pourtant, malgré toute Sa perfection, ce Dieu sage, fort, bon et amour est notre Père; nous lui appartenons.
Père tendre, Berger fidèle, Il nous conduit avec amour. Nourris de Sa main paternelle, Nous sommes à Lui pour toujours.
Nous sommes Ses enfants de par la création et par une nouvelle création en Jésus-Christ. Il est notre Père, par Sa propre volonté. Voilà le sens de « Ta » - un Dieu sage, fort, pur, amour, qui nous tient lieu de père et de mère, un Dieu qui est notre Dieu.

« Ta volonté ». La volonté de Dieu, ce sont Ses désirs, Ses plans, l’oeuvre dont il souhaite l’achèvement et à laquelle Il prête Sa force pour qu’elle s’achève. La terre est Sa création; les hommes sont Ses enfants. Comme le font des parents prudents et aimants, Dieu s’est, lui aussi, consacré Lui-même à tous, pensant à chaque créature humaine, faisant des plans pour l’humanité entière, pour chaque homme, pour la terre elle-même. Son plan est le plus sage, le plus pur, le plus généreux qui se puisse imaginer, et plus encore. Il s’empare de toute notre vie, de chacun de ses détails. Rien n’échappe à Sa vigilance, car elle est étayée sur l’amour. Qu’est-ce qui peut être aussi vigilant, aussi clairvoyant que l’amour ? La haine, son contraire, est ce qui y réussirait le mieux. Ce sont toujours les extrêmes qui se touchent. Toutefois, pour ce qui est de la vigilance, la haine ne peut pas toujours rivaliser avec l’amour. La santé, la force, le foyer, ceux qu’on aime, l’argent, les conseils, la protection, les choses nécessaires à notre vie, Tes attentions auxquelles pense toujours l’amour, les services : tout cela est compris dans la pensée d’amour que Dieu nous consacre.

Telle est Sa volonté, qui se modifie suivant notre obéissance et que les circonstances de la vie transforment à leur tour. La vie est comme un écheveau embrouillé et Dieu, dans Sa patience infinie travaille habilement à le démêler et à tirer le meilleur parti possible de ce fouillis de fils. Ce qui nous semble absolument parfait l’est rarement dans la réalité; ce qui est très bon en soi-même n’est en général pas excellent dans toutes les circonstances et surtout quand des vies humaines sont en jeu.

Dieu a une habileté extraordinaire, une patience illimitée et un amour sans bornes. Il est sans cesse occupé à utiliser chaque circonstance pour en tirer le meilleur résultat possible. Il pourrait souvent faire plus et ce plus, le faire dans un temps beaucoup plus court, si nos volontés étaient plus flexibles. Nous pouvons nous abandonner à Lui, sans arrière-pensée, même dans la nuit où l’on ne peut rien voir. Et cette confiance doit être de la confiance, non une épreuve; là où on se confie, on ne met pas à l’épreuve, car là où on met l’épreuve il n’y a pas de confiance. Si vous priez ainsi, c’est que vous vous confiez en Dieu. Voilà ce qu’il est, ce qu’est Sa volonté et voilà la signification des prières que nous lui offrons.

« Ta volonté soit faite ». La volonté d’un homme est l’homme agissant dans les limites de son pouvoir. La volonté de Dieu, pour l’homme, est Dieu lui-même agissant dans les limites de notre coopération. Le verbe est employé au passif, mais le mot soit contient en lui-même une idée d’action. Il faut l’aide du verbe être pour exprimer le sens passif de tout verbe actif; de même il faut une volonté intensément active pour transformer ce passif en action humaine. La plus grande force se révèle en cédant intelligemment. Dans ce cas, la prière exprime le parfait consentement d’un homme à ce que la volonté de Dieu se fasse en lui et par lui. Un homme ne perd pas sa volonté sans cesser d’être homme. Ici, au contraire, ne sachant se « soumettre » il rend sa volonté aussi forte qu’elle peut être, aussi forte qu’un barreau d’acier, aussi ferme que le chêne vigoureux dont la force est si grande qu’il s’incline et plie au vent. Il emploie ensuite toute cette force à devenir passif devant une volonté plus haute, même si le but de cette dernière n’est pas claire à son intelligence limitée.

« Ta volonté soit faite », c’est-à-dire accomplie, réalisée. Le mot « faite » indique une action parachevée, finie. Sa volonté soit entièrement accomplie, dans tout son ensemble, dans tous ses détails. Ces mots n’expriment pas seulement le sérieux désir d’un coeur qui prie, mais la volonté déterminée que chaque événement de la vie soit soumis à l’action du plan de Dieu. Quand cette prière est faite avec sincérité, elle change complètement le coeur des hommes qui la font et le plan de Dieu se réalise dans leur vie. Ces mots éloignèrent d’un trône puissant le plus grand juriste de la terre, le législateur hébreu, pour l’amener à rechercher l’alliance d’une race d’esclaves. Ces mots firent abandonner au prophète Jérémie, ce géant spirituel, un commandement facile et agréable, pour lui confier une cause méprisée dont lui-même ne devait retirer que de la honte. Ces mots arrachèrent Paul à la place en vue qu’il occupait, pour le conduire chez un peuple où il endura des souffrances inouïes qui se terminèrent par une mort sanglante. Ces mots, enfin, ont fait renoncer Jésus, le Fils de Dieu, à un royaume pour Le conduire à la croix.

Dans chaque génération, le prestige de ces quatre mots a transformé des vies et leurs multiples ambitions. « Ta volonté soit faite », voilà la prière par excellence qui a été l’instrument de Dieu dans toutes Ses grandes actions parmi les hommes.
Cette volonté est faite partout, dans la totalité des mondes créés par Dieu; il existe une seule exception : notre terre et la partie du monde spirituel qui lui est alliée. Partout ailleurs, c’est l’harmonie complète avec la volonté du Père. Sur notre terre seule se fait entendre la note discordante de la résistance.

A cette prière se rattachent deux clauses qui lui donnent son caractère particulier et l’expliquent; elles ont été ajoutées pour en rendre le contenu plus clair. La première de ces clauses donne l’étendue de Sa volonté; la deuxième montre l’opposition faite à cette volonté, ses conséquences pour nos propres vies, pour la race et pour la terre.

Voici la première clause : « Ton règne vienne ». Dans chacune de ces courtes sentences : « Ta volonté soit faite; Ton règne vienne », le mot sur lequel tombe l’accent est Ton. Ce mot marque ici un contraste absolu. Il y a maintenant sur la terre un autre royaume; il y a aussi une autre volonté. Cet autre royaume doit disparaître pour que le règne de Dieu puisse venir.

Les deux royaumes en question sont opposés en tout; ils sont rivaux; ils se disputent la même suzeraineté, le même territoire; ils ne peuvent coexister. Charles Il et Cromwell ne pouvaient vivre ensemble à Londres.

« Ton règne vienne » sous-entend nécessairement cette autre demande : « Que l’autre royaume disparaisse ». «Ton règne vienne» signifie aussi : « Ton roi vienne », car, dans la nature des choses, il ne peut y avoir de royaume sans roi. Par la même déduction, ces mots signifient aussi : « Que l’autre prince parte », celui qui prétend être le véritable héritier du trône. « Ta volonté soit faite », c’est encore, pour la même raison : « Que l’autre volonté soit annihilée »

La deuxième clause contenue dans notre prière et ajoutée pour manifester la force de l’action divine est celle-ci : « Délivre-nous du ma l». Ces deux sentences : « Ta volonté soit faite » et « Délivre-nous du mal » sont unies par un lien tout naturel. Chacune suppose l’autre. L’action complète de Dieu dans nos coeurs nécessite l’émancipation de toute influence mauvaise, soit directe, soit indirecte, soit encore héréditaire. Etre délivré du mal signifie que toute pensée et tout plan de Dieu à notre égard doivent être entièrement accomplis.

Il y a, dans le monde, deux grandes forces à l’oeuvre, deux forces qui se heurtent sans cesse et que nous retrouvons dans le développement de l’histoire et de nos vies. Chez beaucoup d’entre nous, chez nous tous même, quoique a des degrés très différents, ces deux volontés se combattent sans cesse. L’homme est le vrai champ de bataille; la lutte la plus terrible se passe dans sa volonté. Dieu ne veut pas accomplir Sa volonté chez un homme sans que ce dernier y consente; Satan, lui, ne le peut pas. Le point de départ de la lutte contre la volonté de Dieu est l’influence du Diable, et, d’un autre côté, ce qui traverse effectivement les plans de Satan, c’est un homme entièrement consacré à faire ce que Dieu veut.

La prière par excellence commence donc par parcourir tout le champ de bataille; elle eh atteint ensuite le centre pour finalement s’attaquer à l’Ennemi. Cette prière, la voici : « Ton règne vienne ! Ta volonté soit faite ! Délivre-nous du mal ! » Toute prière véridique que nous offrons au Maître dérive de ces paroles si simples et si compréhensives. Et cette supplication peut être adressée, est de fait adressée à Dieu sous mille formes, avec une infinité de détails. Elle est la prière par excellence, parce qu’elle est une prière universelle; elle comprend toutes les autres demandes, car la volonté de Dieu embrasse tout ce qui est l’objet d’une véritable prière. Elle est la prière par excellence, à cause de son intensité; elle frappe au coeur l’Ennemi de Dieu.

 
OBSTACLES A LA PRIERE

(B)

POURQUOI NOUS SOMMES PAS EXAUCES ?


A : Rupture avec Dieu

Dieu répond à la prière. La prière, c’est en somme Dieu et l’homme s’alliant en vue d’un but élevé : l’établissement du règne de Dieu ici-bas. C’est là le but de la prière.

Notre demande et notre attente, l’action de Dieu qui répond nous permettent d’obtenir des résultats qu’il serait impossible d’avoir autrement. La prière transforme tout.

Pourtant beaucoup de prières demeurent sans réponse ou, pour parler plus exactement, beaucoup de prières demeurent sans résultat. Il serait même juste de dire que des milliers de supplications montent au Ciel pour en redescendre sans effet. Le fait est certain; convenons-en franchement et simplement. Plusieurs personnes disent, visant le résultat : « La prière n’est pas ce que vous dites; nous avons prié, mais en vain; rien n’a été changé »

Vous entendrez cette affirmation un peu partout et un peu dans toutes les langues. Des érudits, au style pondéré, des gens irréfléchis, qui effleurent à peine le sujet, bref, des gens de toute sorte se trouvent unis par cette affirmation. Et ils ont raison, parfaitement raison. Malheureusement, ils ne disent pas tout, et ce qu’ils omettent est de nature à changer complètement la conclusion. Ne dire qu’une partie de la vérité, c’est mentir, et de la pire manière.

Le plan de Dieu au sujet de la prière, comme beaucoup d’autres plans, a été fortement modifié; souvent même il fut brisé. Aussi celui qui désire marcher avec Dieu et acquérir autant de puissance que possible doit tout d’abord découvrir ce qui fait obstacle à l’action de la prière.

Il y a trois sortes d’obstacles. Premièrement, nous trouvons en nous une catégorie de sentiments qui coupent toute relation avec Dieu, Source de toute transformation. Puis, il y a en nous certaines choses qui retardent ou diminuent les résultats, contrevenant au complet développement du plan d’action de la prière. Enfin, il y a un grand obstacle extérieur avec lequel il faut compter.

Nous parlerons d’abord de la première catégorie d’obstacles, à savoir ceux qui interceptent tout rapport entre Dieu et Son allié humain.

Ici encore nous rencontrons une triple division, car la Bible mentionne en toutes lettres trois choses qui détruisent l’effet de la prière, La première nous est bien familière, car, hélas ! Des choses répugnantes finissent par nous devenir si familières que nous n’éprouvons plus de répulsion à leur vue. Le péché, voilà une des principales entraves à la prière. Dans les premiers chapitres d’Esaïe, Dieu dit lui-même : « Quand vous étendez vos mains - indiquant par là comment le peuple priait, debout, les mains tendues - je détourne de vous mes yeux; quand vous multipliez les prières, je n’écoute pas » (Esaïe : 1 / 15) Pourquoi ? Quel empêchement y a-t-il ? Ces mains tendues sont souillées. Ils tendent vers Dieu des mains souillées par le péché; et Lui doit assister à ce spectacle qui Lui répugne. Dans le cinquante-neuvième chapitre de ce livre d’Esaïe, (Esaïe : 59 / 1-3)

Dieu parle encore et dit : « Non, la main de l’Eternel n’est pas trop courte pour sauver, ni son oreille trop dure pour vous entendre. »

Il n’y a donc pas le moindre désordre de Son côté; Dieu est parfait.

« Mais - prêtez maintenant toute votre attention - vos iniquités ... vos péchés ... vos mains ... vos doigts ... vos lèvres ... votre langue ... la vase du péché s’infiltre partout. »

Voyons aussi le Psaume : (66 / 18) : « Si j’avais conçu l’iniquité dans mon coeur, le Seigneur ne m’aurait pas exaucé. » Combien plus grave encore, si le péché conçu dans le coeur devient par les mains une puissance agissante ! Une fois pour toutes, disons clairement, sans réticences : « Le péché est un obstacle à la prière ». Cela n’a rien de surprenant; c’est le contraire qui le serait. La prière nous met en relation avec Dieu; le péché rompt toute relation avec Lui.

Supposez que mon appartement soit relié par un fil direct avec ma maison de Cleveland et que quelqu’un détende le fil et lui fasse toucher le sol sur une longue étendue; pourrai-je télégraphier par ce fil ? Un enfant même sait que cela me serait impossible. Supposez aussi que quelqu’un coupe le fil; les deux bouts sont séparés; il n’y a pas un kilomètre, que dis-je ? Peut-être pas un mètre de distance; mais cela suffit : les deux fils sont nettement séparés. Réussirai-je à télégraphier par ce fil ? Assurément non. Et pourtant, je pourrais être assis dans ma chambre et télégraphier une heure durant, complètement absorbé; je pourrais expédier le plus beau et le plus persuasif des discours. A quoi bon ? Le fil est coupé. Tout mon beau plaidoyer s’en va dans les airs ou dans la terre. De même, le péché coupe le fil et le message disparaît dans le sol.

« Parfaitement, me dira-t-on; mais, par cette affirmation, vous nous coupez à nous tous toute communication. Chacun de nous n’a-t-il pas sur la conscience quelque péché, petit ou grand, contre lequel il doit lutter et qu’il doit surmonter sans cesse ? » Il est certainement exact que plus un homme se sent près de Dieu, plus il est conscient de ses tendances pécheresses, même s’il remporte continuellement la victoire. Voici simplement ce que veut dire l’Ecriture : « Si je conserve dans ma vie un interdit, si je n’obéis pas à l’ordre du Maître, je commets un péché. Mon action peut être mauvaise en elle-même, comme elle peut ne pas l’être; qui sait ? Elle peut être juste aux yeux d’un autre. Qu’importe ! Si la voix intérieure, fidèle et sereine, a parlé, si je sais ce que le Maître désire et si je n’obéis pas, j’ai péché. Alors il est inutile de prier, c’est une pure perte de temps; dans cette situation, la prière ne peut que provoquer des déceptions. En effet, je me dirai : « Je ne suis pas aussi bon que celui-ci ou celui-là; toutefois, je ne suis pas tellement mauvais, puisque je prie. » En réalité, parce que j’ai rompu avec Dieu, ma prière - ou plutôt les mots que je dis sous forme de prière - n’a absolument aucune valeur. »

Vous voyez que le péché est une insulte faite à Dieu. Il peut être poli, civilisé; il est capable d’atteindre un haut degré de finesse ou il peut être tout à fait vulgaire. Un homme se soucie-t-il de la nature du gourdin qui le frappe ? Comment, Dieu et moi, pouvons-nous causer ensemble si j’ai péché et si, persévérant dans cet état, je n’ai pas imploré Son pardon ? Et si nous ne pouvons causer avec Dieu quand nous demeurons dans le péché, nous ne pourrons naturellement travailler ensemble. Or, la prière est un travail fait de concert avec Dieu. Prier, c’est hâter l’exécution du plan que Dieu a fait pour notre monde. Et nous, qui savons cela, n’arracherons-nous pas de nos coeurs ce qui est mal ? N’y mettrons-nous pas à la place ce que le Maître désire ? Ne le ferons-nous pas au nom de Jésus ? Au nom des hommes même ? Au nom de ces pauvres hommes trompés qui sont tenus loin de Dieu, parce qu’il ne peut les atteindre par notre moyen ? Ne nous humilierons-nous pas et ne demanderons-nous pas pardon pour notre péché, notre entêtement mesquin qui a contrarié le plan d’amour du Maître ? Pendant que nous implorons notre pardon, il y a, là-bas, des vies faussées, arrêtées dans leur développement - pis peut-être - uniquement à cause de l’obstacle qu’il y a en nous; et ces vies, tandis que nous sortons de cette assemblée, restent plongées dans ce triste état.

Puisse cette pensée, à l’avenir, nous rendre particulièrement attentifs à nos actes !

B : Le péché, point d’appui donné à Satan

La Bible parle d’un second obstacle à l’exaucement de la prière. Il en est question dans l’épître de Jacques : (Jacques : 4 / 2-3) : « Vous ne possédez pas, parce que vous ne demandez pas ». Voilà qui explique mainte vie desséchée, mainte Eglise endormie et plus d’un problème insoluble. Nous n’offrons pas au Créateur l’occasion d’intervenir. L’apôtre continue et dit : « Vous demandez et vous ne recevez pas »

Ah ! Nous y voilà ! Cette absence de réponse à nos prières est évidemment une vieille question. Mais pourquoi ne recevez-vous pas ? « Parce que vous demandez mal, parce que vous demandez dans le but de satisfaire vos passions » Ce qui veut dire que notre prière est égoïste, que nous réclamons ce que nous désirons pour notre propre usage.

Voici une mère qui prie pour son fils, presque un jeune homme déjà; ce n’est pas un chrétien, c’est toutefois un brave garçon. Elle se dit : Je désire que mon fils me fasse honneur; il porte mon nom; mon sang coule dans ses veines. Je souhaite qu’il soit. Un homme distingué, qu’il honore sa famille. Certainement il sera tout cela s’il est un vrai chrétien. Je désire donc qu’il devienne chrétien. C’est ainsi qu’elle prie sans cesse, avec ferveur. Dieu pourrait toucher le coeur de son garçon et dire : « J’ai besoin de toi aux Indes pour m’aider à regagner mon territoire ». Mais elle, la mère, ne pensait pas à cela. Son fils, là-bas, si loin, aux Indes ! Oh ! Non, pas cela ! C’est par égoïsme qu’elle a prié. Sa prière est un ruisseau qui se déverse dans une mer morte. Elle ne pensait pas à Dieu, à Son oeuvre de salut pour notre pauvre monde abusé par le péché. La prière de cette femme est en elle-même, et, étant donné son objet, tout à fait naturelle, et Dieu a exaucé déjà un nombre incalculable de demandes semblables. Mais, prenons-y garde, le motif égoïste, l’égoïsme qui l’anime, devient un marchepied pour Satan, et ainsi le but de la prière se trouve déplacé.

Voici maintenant une autre femme priant pour que son mari devienne chrétien. Sa pensée est celle-ci : « Je désire qu’il se convertisse; cela serait si gentil; vraiment, il n’y aurait rien de plus beau; il viendrait à l’église avec moi et s’assiérait à notre banc; ce serait parfait ». Elle pense probablement encore qu’il né jurerait plus, qu’il ne boirait plus et serait plus aimable à la maison.
Elle ajoute peut-être : « Il prierait avant les repas ! Nous aurions le culte de famille ». Il se pourrait bien que l’exaucement de sa prière ne soit pas immédiat. Voici ce que j’en pense moi-même : « Si les pensées de cette femme ne dépassent pas un certain cercle d’idées, vous auriez raison de la qualifier d’égoïste. Elle pense à elle-même et non pas à Dieu qui est affligé de voir son mari dans un état de rébellion contre Ses lois. Qui sait, Dieu pourrait toucher le coeur de son mari et lui dire : « J’ai besoin de toi pour la conquête du monde ». Ce changement de vie amènerait probablement une diminution de ses revenus, changerait sa position sociale. Oh ! Non, elle n’avait pas songé à ces transformations, mais uniquement à son propre avantage »

Voici maintenant un pasteur qui demande à Dieu le réveil de son Eglise. Ses pensées intimes, à peine connues de lui-même, sont peut-être celles-ci : « Puissions-nous avoir un puissant réveil dans notre Eglise; puisse le nombre de ses membres s’accroître, la fréquentation des cultes augmenter; nos finances seront améliorées; mon propre traitement sera élevé et mon Eglise fera parler d’elle; qui sait, je pourrai être promu à un poste plus important. Ah ! Si seulement nous avions un réveil ! »

Aucun pasteur, de nos jours, ne tiendrait un tel langage, ni n’entretiendrait de propos délibéré une telle pensée. Mais vous savez quelle ruse se cache dans le tréfonds de nos coeurs. S’il arrive donc que nous ayons de telles pensées à la base de nos prières, le motif en est évidemment égoïste. C’est ainsi que Satan en a changé le nom et le caractère. Notez, je vous prie, que ce n’est pas par répugnance à accomplir une chose désirable que Dieu n’exauce pas de telles prières. Au contraire, jamais Il ne perd l’occasion de travailler pour Son peuple, pourvu qu’il ait quelque chance de réussite; Il lui arrive même d’employer des hommes dont les conceptions sont fausses et les motifs intéressés. La raison de son refus est plus profonde : c’est que l’égoïsme permet à Satan de prendre pied; il lui donne un refuge dans notre coeur. Le diable fait tout son possible pour arrêter nos prières et, quand il ne peut y réussir, il s’efforce, autant que faire se peut, d’en gâter les résultats.

On peut, en toute conscience, prier pour plusieurs motifs tout à fait personnels : pour se maintenir en santé, pour être guéri; on prie pour ceux qu’on aime; on prie quand on a besoin d’argent; en vérité, nous osons prier pour mille choses qui peuvent ne pas être nécessaires, mais seulement désirables, car notre Dieu est un Dieu d’amour dont le désir est que Ses créatures jouissent pleinement de la vie.

La raison pour laquelle nous prions, voilà ce qui détermine le bien-fondé de nos requêtes. Quand le but de la vie d’un homme est le plan de Dieu, toutes ces choses peuvent être demandées librement, selon l’inspiration du Saint-Esprit. Et point n’est besoin de se creuser la tête, de réfléchir sans cesse. Il sait si le but de nos cœurs ! Correspond à Ses désirs.

 
C : Le plus court chemin pour aller à Dieu

Un troisième obstacle à la prière est un esprit rancunier. Vous avez pu remarquer que Jésus parle beaucoup de la prière et beaucoup aussi de pardon; mais avez-vous observé combien souvent Il joint ces deux mots: prière et pardon? Je me suis souvent demandé pourquoi; maintenant, cela ne m’étonne guère. L’explication monte de toutes les blessures mal fermées que nous observons de partout. Même lorsqu’on n’en tend pas de plainte, il suffit d’ouvrir les yeux pour voir combien délicat est notre épiderme et vive notre sensibilité, pour apercevoir de tous côtés, largement ouvertes des plaies que personne n’a soignées.

Les nombreuses allusions de Jésus à ce sujet nous montrent combien l’Oriental et l’Occidental, le premier et le vingtième siècle se ressemblent. Prenez l’Evangile de Matthieu, vous y lirez : « Si tu t’approches de l’autel - c’est-à-dire de Dieu par la prière - et que tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande et t’en va jusqu’à ce que tu sois réconcilié » (Matthieu : 5 / 23-24)

Voici venir un homme avec un agneau; il s’approche avec solennité et respect de l’autel de Dieu. Mais comme il s’avance, subitement surgit dans son esprit l’image d’un homme avec lequel il a eu quelques difficultés. A ce seul souvenir, ses poings se serrent, ses dents grincent. Jésus dit : « Si tel est le cas, laisse là ton agneau ». Comment ! Il faut s’en aller, brusquement ? Que vont dire les gens qui se rendent au temple ? - « Pose l’agneau et t’en va. - Le plus court chemin pour aller à Dieu n’est pas celui de l’autel, mais celui qui passe devant la maison de ton ennemi. - Premièrement, réconcilie-toi - la réconciliation d’abord, c’est absolument essentiel - ensuite, va et présente ton offrande. »

Dans le chapitre six de saint Matthieu, (Matthieu : 6 / 9-15) Dieu nous donne la prière-type que nous appelons communément l’oraison dominicale. Elle renferme sept demandes, dont une, celle du pardon, reçoit un accent tout spécial.

Matthieu : 18 / 19, nous voyons Jésus s’entretenant seul avec ses disciples sur la prière. Pierre semble se souvenir des remarques faites précédemment sur les relations du pardon et de la prière; il pose cette question : « Mais combien de fois dois-je pardonner à un homme ? Sera-ce jusqu’à sept fois ? » - Sûrement, Pierre estime qu’il a fait de grands progrès spirituels, puisqu’il peut maintenant penser à pardonner sept fois de suite à son prochain. Le Maître lui répond : « Pierre, tu ne m’as pas compris. Le pardon n’est pas du domaine des mathématiques; il ne s’agit pas de faire à ton prochain tel ou tel crédit. Ce n’est pas sept fois, mais soixante-dix fois sept fois » Et les yeux de l’apôtre s’ouvrent tout grands d’étonnement - « Quatre cent quatre-vingt-dix fois ... successivement ... à un seul homme ! ... » Jésus, apparemment, espère par là qu’il se fatiguera de compter et conclura que le pardon est préférable à tout; ce que Jésus veut, c’est que Son disciple arrive à s’imprégner de l’esprit du pardon.


Selon son habitude, Jésus leur raconta une histoire pour illustrer sa pensée : « Un homme devait à son maître une somme énorme, mille talents, c’est-à-dire une somme que, en fait, il ne pouvait pas payer et qui correspond à des millions de notre monnaie. Le débiteur se rendit chez son créancier et lui demanda un délai. Je n’ai pas les fonds en ce moment, lui dit-il, mais j’ai la ferme intention de payer; je ne veux nullement me dérober à mes obligations; je demande un arrangement et, en temps voulu, je paierai la somme entière. » Le maître alors lui remit complètement sa dette. - Tel est le tableau que Jésus fait de Dieu, et personne ne connaît mieux le Père que le Fils.

- Cet homme sortit alors et trouva un camarade qui lui devait - ceci nous montre que Jésus avait un sens profond du comique - qui lui devait quatre-vingts francs et quelques centimes; aussitôt il le saisit à la gorge et lui dit : « Paie-moi ce que tu me dois ». Son débiteur de le supplier instamment et de lui dire : « Je t’en prie, sois accommodant; j’ai la ferme intention de payer; je suis justement à court ces jours-ci, mais je ne veux nullement me dérober à mes obligations; aie un peu de patience ». Ces mots sont familiers à celui auxquels ils s’adressent, mais il ne veut pas les entendre et fait jeter son débiteur en prison, ce qui n’était guère le moyen de se faire payer.
 
 



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